Dans la rouge fournaise et les brasiers fleuris Le soleil couchant brûle au-dessus de Paris, Tandis qu´entre les murs étouffants de la ville, Une foule indolente, affairée et servile De femmes étalant des ornements royaux
Et d´hommes ficelés et coiffés de tuyaux Marche sur le bitume en file irrégulière, Et que grouille au hasard la noire fourmilière. Dans le ciel qui se fait un jeu d´associer La douce rose avec des crudités d´acier; Dans le ciel éclatant de sang, d´or et de soufre Se tord de désespoir tout un peuple qui souffre; Ce sont les Dieux, les rois, les guerriers, les vainqueurs, Ceux qui donnent pour nous tout le sang de leurs coeurs. Dans la flamme, pareille à des oranges mûres, Ce sont les Dieux, casqués, mitrés, couverts d´armures, Bourreaux du néant sombre et du marais hideux. On les voit désolés et tristes. Autour d´eux, Parmi les feux rougis, passent des chars qui roulent
Et des fleuves de feu dans la clarté s´écroulent. Des animaux, chevaux, grands lions, aigles roux, Brillent dans un éclair d´orage et de courroux; Et devant tous les rois apparaît, la première, Une figure blanche et faite de lumière, Dont le visage clair et pénétré de jour Épand une clarté de douceur et d´amour. Et les Dieux dans le ciel brûlant qui s´irradie Se tordent, frémissants, mordus par l´incendie. Sentant s´ouvrir pour eux le gouffre incandescent, Ils exhalent enfin leur plainte, et s´adressant A l´homme, qui n´a plus d´espoir ni de bravoure, Cependant que la flamme atroce les entoure Et dévore leurs fronts vermeils et leurs cheveux, Ils disent: Nous mourons parce que tu le veux!