Ô belle hospitalière Qui ne me connais pas, Vierge publique et fière Qui m’as ouvert les bras !… Rompant ma longue chaîne, L’eunuque m’a jeté Sur ton sein royal, Reine !… – Vanité, vanité ! –
Comme la Vénus nue, D’un bain de lait de chaux Tu sors, blanche Inconnue, Fille des noirs cachots Où l’on pleure, d’usage…
– Moi : jamais n’ai chanté Que pour toi, dans ta cage, Cage de la gaîté !
La misère parée Est dans le grand égout ; Dépouillons la livrée Et la chemise et tout ! Que tout mon baiser couvre Ta franche nudité… Vraie ou fausse, se rouvre Une virginité !
– Plus ce ciel louche et rose Ni ce soleil d’enfer !… – Ta paupière mi-close Tes cils, barreaux de fer ! Ta ceinture-dorée, De fer ! – Fidélité – Et ta couche encastrée Tombeau de volupté !
À nos cœurs plus d’alarmes : Libres et bien à nous !…
Sens planer les gendarmes, Pigeons du rendez-vous ; Et Cupidon-Cerbère À qui la sûreté De nos amours est chère… Quatre murs ! – Liberté !
Ho ! l’Espérance folle – Ce crampon – est au clou. L’existence qui colle Est collée à l’écrou. Le souvenir qui hante À l’huys est resté ; L’huys n’a pas de fente…
– Oh le carcan ôté ! –
Laissons venir la Muse, Elle osera chanter ; Et, si le jeu t’amuse, Je veux te la prêter… Ton petit lit de sangle, Pour nous a rajouté Les trois bouts du triangle : Triple amour ! – Trinité !
Plus d’huissiers aux mains sales ! Ni mains de chers amis ! Ni menottes banales !… – Mon nom est Quatre-Bis. – Hors la terrestre croûte, Désert mal habité, Loin des mortels je goûte
Un peu d’éternité.
– Prison, sûre conquête Où le poète est roi ! Et boudoir plus qu’honnête Où le sage est chez soi, Cruche, au moins ingénue, Puits de la vérité ! Vide, quand on l’a bue… – Vase de pureté ! –
– Seule est ta solitude, Et béats tes ennuis Sans pose et sans étude… Plus de jours, plus de nuits ! C’est tout le temps dimanche, Et le far-niente
Dort pour moi sur la planche De l’idéalité…
… Jusqu’au jour de misère Où, condamné, je sors Seul, ramer ma galère… Là, n’importe où,… dehors, Laissant emprisonnée À perpétuité Cette fleur cloisonnée, Qui fut ma liberté…
– Va : reprends, froide et dure, Pour le captif oison, Ton masque, ta figure De porte de prison… Que d’autres, basse race Dont le dos est voûté,