💃🎤 Paroles de chanson Française et Internationnales 🎤💃

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Artiste : Victor Hugo
Titre : Ceux qui vivent, ce sont ceux qui luttent ; ce sont…
Ceux qui vivent, ce sont ceux qui luttent ; ce sont
Ceux dont un dessein ferme emplit l´âme et le front,
Ceux qui d´un haut. destin gravissent l´âpre cime,

Ceux qui marchent pensifs, épris d´un but sublime,
Ayant devant les yeux sans cesse, nuit et jour,
Ou quelque saint labeur ou quelque grand amour.
C´est le prophète saint prosterné devant l´arche,
C´est le travailleur, pâtre, ouvrier, patriarche,
Ceux dont le coeur est bon, ceux dont les jours sont pleins.
Ceux-là vivent, Seigneur ! les autres, je les plains.
Car de son vague ennui le néant les enivre,
Car le plus lourd fardeau, c´est d´exister sans vivre.
Inutiles, épars, ils traînent ici-bas
Le sombre accablement d´être en ne pensant pas.
Ils s´appellent vulgus, plebs, la tourbe, la foule.

Ils sont ce qui murmure, applaudit, siffle, coule,
Bat des mains, foule aux pieds, bâille, dit oui, dit non,
N´a jamais de figure et n´a jamais de nom ;
Troupeau qui va, revient, juge, absout, délibère,
Détruit, prêt à Marat comme prêt à Tibère,
Foule triste, joyeuse, habits dorés, bras nus,
Pêle-mêle, et poussée aux gouffres inconnus.
Ils sont les passants froids sans but, sans noeud, sans âge ;
Le bas du genre humain qui s´écroule en nuage ;
Ceux qu´on ne connaît pas, ceux qu´on ne compte pas,
Ceux qui perdent les mots, les volontés, les pas.
L´ombre obscure autour d´eux se prolonge et recule

Ils n´ont du plein midi qu´un lointain crépuscule,
Car, jetant au hasard les cris, les voix, le bruit,
Ils errent près du bord sinistre de la nuit.

Quoi ! ne point aimer ! suivre une morne carrière
Sans un songe en avant, sans un deuil en arrière,
Quoi ! marcher devant soi sans savoir où l´on va,
Rire de Jupiter sans croire à Jéhovah,
Regarder sans respect l´astre, la fleur, la femme,
Toujours vouloir le corps, ne jamais chercher l´âme,
Pour de vains résultats faire de vains efforts,

N´attendre rien d´en haut ! ciel ! oublier les morts !
Oh non, je ne suis point de ceux-là ! grands, prospères,
Fiers, puissants, ou cachés dans d´immondes repaires,
Je les fuis, et je crains leurs sentiers détestés
Et j´aimerais mieux être, ô fourmis des cités,
Tourbe, foule, hommes faux, coeurs morts, races déchues,
Un arbre dans les bois qu´une âme en vos cohues !

Paris. 31 décembre l848. Minuit.