Nous errions, elle et moi, dans les monts de Sicile. Elle est fière pour tous et pour moi seul docile. Les cieux et nos pensers rayonnaient à la fois.
Oh! comme aux lieux déserts les coeurs sont peu farouches! Que de fleurs aux buissons, que de baisers aux bouches, Quand on est dans l´ombre des bois!
Pareils à deux oiseaux qui vont de cime en cime, Nous parvînmes enfin tout au bord d´un abîme. Elle osa s´approcher de ce sombre entonnoir; Et, quoique mainte épine offensât ses mains blanches, Nous tâchâmes, penchés et nous tenant aux branches, D´en voir le fond lugubre et noir.
En ce même moment, un titan centenaire, Qui venait d´y rouler sous vingt coups de tonnerre,
Se tordait dans ce gouffre où le jour n´ose entrer; Et d´horribles vautours au bec impitoyable, Attirés par le bruit de sa chute effroyable, Commençaient à le dévorer.
Alors, elle me dit: -J´ai peur qu´on ne nous voie! -Cherchons un antre afin d´y cacher notre joie! -Vois ce pauvre géant! nous aurions notre tour! -Car les dieux envieux qui l´ont fait disparaître, -Et qui furent jaloux de sa grandeur, peut-être -Seraient jaloux de notre amour!-