Le poète s´en va dans les champs ; il admire, Il adore ; il écoute en lui-même une lyre ; Et le voyant venir, les fleurs, toutes les fleurs, Celles qui des rubis font pâlir les couleurs,
Celles qui des paons même éclipseraient les queues, Les petites fleurs d´or, les petites fleurs bleues, Prennent, pour l´accueillir agitant leurs bouquets, De petits airs penchés ou de grands airs coquets, Et, familièrement, car cela sied aux belles : - Tiens ! c´est notre amoureux qui passe ! disent-elles. Et, pleins de jour et d´ombre et de confuses voix, Les grands arbres profonds qui vivent dans les bois, Tous ces vieillards, les ifs, les tilleuls, les érables, Les saules tout ridés, les chênes vénérables,
L´orme au branchage noir, de mousse appesanti, Comme les ulémas quand paraît le muphti, Lui font de grands saluts et courbent jusqu´à terre Leurs têtes de feuillée et leurs barbes de lierre, Contemplent de son front la sereine lueur, Et murmurent tout bas : C´est lui ! c´est le rêveur !