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Artiste : Victor Hugo
Titre : Napoléon III
Donc c´est fait. Dût rugir de honte le canon,
Te voilà, nain immonde, accroupi sur ce nom !
Cette gloire est ton trou, ta bauge, ta demeure !
Toi qui n´as jamais pris la fortune qu´à l´heure,

Te voilà presque assis sur ce hautain sommet !
Sur le chapeau d´Essling tu plantes ton plumet ;
Tu mets, petit Poucet, ces bottes de sept lieues ;
Tu prends Napoléon dans les régions bleues ;
Tu fais travailler l´oncle, et, perroquet ravi,
Grimper à ton perchoir l´aigle de Mondovi !
Thersite est le neveu d´Achille Péliade !
C´est pour toi qu´on a fait toute cette Iliade !
C´est pour toi qu´on livra ces combats inouïs !
C´est pour toi que Murat, aux russes éblouis,
Terrible, apparaissait, cravachant leur armée !
C´est pour toi qu´à travers la flamme et la fumée
Les grenadiers pensifs s´avançaient à pas lents !
C´est pour toi que mon père et mes oncles vaillants

Ont répandu leur sang dans ces guerres épiques !
Pour toi qu´ont fourmillé les sabres et les piques,
Que tout le continent trembla sous Attila,
Et que Londres frémit, et que Moscou brûla !
C´est pour toi, pour tes Deutz et pour tes Mascarilles,
Pour que tu puisses boire avec de belles filles,
Et, la nuit, t´attabler dans le Louvre à l´écart,
C´est pour monsieur Fialin et pour monsieur Mocquart,
Que Lannes d´un boulet eut la cuisse coupée,
Que le front des soldats, entrouvert par l´épée,
Saigna sous le shako, le casque et le colback,
Que Lasalle à Wagram, Duroc à Reichenbach,

Expirèrent frappés au milieu de leur route,
Que Caulaincourt tomba dans la grande redoute,
Et que la vieille garde est morte à Waterloo !
C´est pour toi qu´agitant le pin et le bouleau,
Le vent fait aujourd´hui, sous ses âpres haleines,
Blanchir tant d´ossements, hélas ! dans tant de plaines !
Faquin ! Tu t´es soudé, chargé d´un vil butin,
Toi, l´homme du hasard, à l´homme du destin !
Tu fourres, impudent, ton front dans ses couronnes !
Nous entendons claquer dans tes mains fanfaronnes
Ce fouet prodigieux qui conduisait les rois
Et tranquille, attelant à ton numéro trois
Austerlitz, Marengo, Rivoli, Saint-Jean-d´Acre,
Aux chevaux du soleil tu fais traîner ton fiacre !

Jersey, 31 mai 1853.