💃🎤 Paroles de chanson Française et Internationnales 🎤💃

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Artiste : Victor Hugo
Titre : Un Bon Bourgeois dans sa maison
Mais que je suis donc heureux d´être né en Chine ! Je possède une maison pour m´abriter, j´ai de quoi manger et boire, j´ai toutes les commodités de l´existence, j´ai des habits, des bonnets et une multitude d´agréments ; en vérité, la félicité la plus grande est mon partage !

THIEN-CI-KHI, LETTRÉ CHINOIS.

Il est certains bourgeois, prêtres du dieu Boutique,
Plus voisins de Chrysès que de Caton d´Utique,
Mettant par-dessus tout la rente et le coupon,
Qui, voguant à la Bourse et tenant un harpon,
Honnêtes gens d´ailleurs, mais de la grosse espèce,
Acceptent Phalaris par amour pour leur caisse,
Et le taureau d´airain à cause du veau d´or.
Ils ont voté. Demain ils voteront encor.
Si quelque libre écrit entre leurs mains s´égare,
Les pieds sur les chenets et fumant son cigare,
Chacun de ces votants tout bas raisonne ainsi :
Ce livre est fort choquant. De quel droit celui-ci

Est-il généreux, ferme et fier, quand je suis lâche ?
En attaquant monsieur Bonaparte, on me fâche.
Je pense comme lui que c´est un gueux ; pourquoi
Le dit-il ? Soit, d´accord, Bonaparte est sans foi
Ni loi ; c´est un parjure, un brigand, un faussaire,
C´est vrai ; sa politique est armée en corsaire
Il a banni jusqu´à des juges suppléants ;
Il a coupé leur bourse aux princes d´Orléans
C´est le pire gredin qui soit sur cette terre ;
Mais puisque j´ai voté pour lui, l´on doit se taire.
Ecrire contre lui, c´est me blâmer au fond ;
C´est me dire : voilà comment les braves font
Et c´est une façon, à nous qui restons neutres,
De nous faire sentir que nous sommes des pleutres.

J´en conviens, nous avons une corde au poignet.
Que voulez-vous ? la Bourse allait mal ; on craignait
La république rouge, et même un peu la rose
Il fallait bien finir par faire quelque chose

On trouve ce coquin, on le fait empereur ;
C´est tout simple. On voulait éviter la terreur,
Le spectre de monsieur Romieu, la jacquerie
On s´est réfugié dans cette escroquerie.
Or, quand on dit du mal de ce gouvernement,
Je me sens chatouillé désagréablement.
Qu´on fouaille avec raison cet homme, c´est possible
Mais c´est m´insinuer à moi, bourgeois paisible
Qui fis ce scélérat empereur ou consul,
Que j´ai dit oui par peur et vivat par calcul.
Je trouve impertinent, parbleu, qu´on me le dise.

M´étant enseveli dans cette couardise,
Il me déplaît qu´on soit intrépide aujourd´hui,
Et je tiens pour affront le courage d´autrui.

Penseurs, quand vous marquez au front l´homme punique
Qui de la loi sanglante arracha la tunique,
Quand vous vengez le peuple à la gorge saisi,
Le serment et le droit, vous êtes, songez-y,
Entre Sbogar qui règne et Géronte qui vote ;
Et votre plume ardente, anarchique, indévote,
Démagogique, impie, attente d´un côté
A ce crime ; de l´autre, à cette lâcheté.

Novembre 1852. Jersey.