C´est nous lâorgueil des Batignolles; Nous sommes les petits trottins; Notre maman par des torgnioles, Nous ĂŠveille tous les matins. On se lève vite, on enfile
Sa robe au grand galop et, zou ! On descend trotter par la ville Grignotant un croissant d´un sou.
Nous portons un´ pauv´ petit´ robe, Tout ´ noire avec le coude usÊ; Mais les trÊsors qu´elle dÊrobe Intrigu´nt des vieux à l´air rusÊ. On r´trouss´ sa jup´ pour être ingambe, Et peut-être Êgalement pour Fair´ constater que notre jambe, Comm´ celle des chais´s est faite au tour.
Nous rions comme des gamines Au nez du passant ĂŠpatĂŠ; Ăa fait rire aussi nos bottines Par la fente de leur cĂ´tĂŠ. Nous allons provocant´s et fraĂŽches,
Un brin d´fleur dans les ch´veux fichĂŠ; Et nous avons lâattrait des pĂŞches En mĂŞme temps quâcelui du pĂŠchĂŠ.
Aussi faut voir comme c´est drĂ´le, L´effet qu´nous produisons aux vieux; Ils rougissent quand on les frĂ´le, Et s´mett´nt Ă bĂŠgayer des yeux. L´rigolo, c´est de s´laisser faire, Puis dâdire avec des airs cassants : "Maint´nant faut m´suivrâ chez lâcommisssaire "Monsieur, jân´ai pas encorâ seize ans !"
L´amour ! oh lĂ lĂ ! c´qu´on s´en fiche, Du moment qu´y n´ rapporte rien ! C´que nous voulons, c´est dev´nir riche, Et peu nous importe lâmoyen. Tout se transformant sur la terre,
Le trottin devient un beau jour Fleur de lit pour cÊlibataire, Ou papillon de nuit d´amour.
On n´arriv´ pas sans quĂŠqu´s ĂŠtudes; Et puis c´est pas toujours tentant; Y en a qu´ont dâsi drĂ´lâs d´habitudes ! Mais c´est pas ça lâplus embĂŞtant : Y a des gens qu´ont pas dâsavoir-vivre, Et qui, quand ils vous lâch´nt, les gueux, Au lieu de rent´s sur le Grand-Livre, N´vous ont fait qu´un enfant,- ou deux !